Le Carré Bleu

feuille Internationale d'architecture

O.I.A. « Projet Directive européenne sur l’architecture et le cadre de vie »

« Projet Directive européenne sur l’architecture et le cadre de vie »

exposé des motifs
Puisque l’architecture est d’intérêt public, les Etats-membres doivent créer les conditions pour que s’exerce le droit à la qualité architecturale de la population. Il s’agit de faire en sorte que les spécialistes compétents, architectes et urbanistes, puissent remplir leur rôle de façon satisfaisante, dans l’intérêt de tous les citoyens.
Ces modalités et garanties d’exercice de la profession d’architecte, le respect de règles pour la passation des commandes, l’établissement des contrats pour l’étude et la construction de bâtiments ou pour les études ou opérations d’aménagement apparaissent comme des conditions nécessaires, sinon suffisantes, pour l’amélioration de la qualité de l’environnement construit européen.
Chaque pays doit soit légiférer dans ce sens, s’il n’a pas de loi sur l’architecture, soit améliorer la loi existante, dans l’esprit de la directive.
La loi doit garantir un jeu équitable de la concurrence à l’intérieur de chaque pays et l’égalité du droit à la qualité du cadre de vie pour les citoyens des différents pays.

exte original approuvé par l’Assemblée de l’O.I.A
le 8 novembre 1997, à Paris, Institut Finlandais de Culture

TITRE 1 INTÉRÊT PUBLIC DE L’ARCHITECTURE

Art. 1. L’architecture est une expression particulière de la culture qui implique en même temps des aspects esthétiques, historiques, sociaux, économiques et productifs.
La qualité de la conception architecturale, l’insertion dans le paysage des nouvelles interventions, le respect et la mise en valeur du paysage naturel et des qualités urbaines, l’utilisation totale du patrimoine existant, la régénération de la ville répondent à un intérêt public et représentent un droit de tous les citoyens.
Les pouvoirs publics sont responsables du respect de l’intérêt public de l’architecture.

Art. 2 L’architecture relève du champ de compétence de l’Union Européenne.

Les Etats membres modifient leurs lois selon les principes suivants, dans les délais les plus courts, en déterminant des priorités, et, si possible, des échéances communes :
– l’architecture est une prestation intellectuelle (et pas un service),
– le projet doit apporter la meilleure solution aux besoins exprimés par le maître d’ouvrage et aux intentions traduites dans le programme,
– des interventions de qualité s’obtiennent aussi en favorisant la transparence dans la sélection des architectes ou l’attribution des projets à l’issue d’une compétition de haut niveau d’exigence,
– l’organisation des opérations doit assurer la consultation du client réel, l’utilisateur du bâtiment,
– les administrations publiques doivent favoriser l’innovation, l’amélioration de la qualité architecturale et la qualification professionnelle en organisant des concours de projet et en publiant leurs résultats,
– les maîtres d’ouvrage privés qui recherchent la qualité architecturale par la voie du concours peuvent bénéficier d’avantages financiers ou fiscaux,
– pour être à la base du projet les demandes du maître d’ouvrage à l’architecte doivent être explicites, claires et exhaustives surtout en ce qui concerne les aspects fonctionnels et économiques,
– le projet a un caractère unitaire et doit être développé dans toutes ses phases, selon un processus continu, par le même professionnel ou avec son approbation; il est d’intérêt public qu’une réalisation conforme au projet soit garantie.

Les Etats-membres doivent encourager le développement durable dans l’aménagement du cadre de vie.

TITRE 2 CRÉATION ET FONCTIONNEMENT DES CONSEILS SUPÉRIEURS POUR L’ARCHITECTURE, L’URBANISME ET L’ENVIRONNEMENT

Art. 3 Dans chaque Etat membre est créé un Conseil Supérieur de l’Architecture, l’Urbanisme et l’Environnement auprès du Ministère compétent.
Le Conseil compte vingt et un membres dont quatorze élus parmi des professionnels exerçant depuis au moins vingt ans par les institutions culturelles et les organisations publiques de la profession; et sept choisis parmi des experts réputés en disciplines différentes, nommés par décret du Ministre.
Le Conseil exprime des avis sur des normes ayant une influence sur l’architecture, sur les questions concernant la profession et les aspects professionnels de l’enseignement de l’architecture et de l’ingénierie.
En outre le Conseil exprime des avis sur des questions qui ont un impact important sur le territoire et le bâti, à la demande des Administrations Publiques et des collectivités locales.
Les Ministres compétents définissent par des décrets nationaux séparés mais coordonnés les modalités de fonctionnement et de saisine du Conseil.
Chaque Conseil désigne en son sein trois représentants (dont un au moins parmi les experts) au Comité de coordination européen des Conseils de l’Architecture, de l’Urbanisme et de l’Environnement. Le Comité exprime des avis sur les normes qui peuvent influencer l’architecture.
L’Etat ou les collectivités locales financent le fonctionnement des Conseils.

Art. 4 Chaque Etat-membre doit créer, le cas échéant, des Conseils régionaux ou départementaux en déterminant les critères de leur composition et fonctionnement et doit promouvoir la création de points de discussion entre les citoyens, les experts et les administrations sur les questions de la transformation de la ville et du cadre de vie.

TITRE 3 LA FONCTION DE MAÎTRE D’OUVRAGE

Art. 5 Dans la présente directive, qui concerne l’architecture, on entend par « maître d’ouvrage » toute personne physique ou morale qui confie un mandat à un architecte (au sens de l’article 11).

Art. 6 Quiconque désire entreprendre des travaux de construction d’un bâtiment ou de transformation du territoire qui nécessitent un projet doit avoir recours à un architecte (au sens de l’art.11) avec ou sans la contribution de spécialistes d’autres disciplines.
Les Etats membres peuvent établir qu’il n’est pas obligatoire d’avoir recours à un architecte pour des travaux d’organisation intérieure dans des bâtiments existants, en excluant les bâtiments protégés pour leur valeur historique, artistique ou environnementale.

Art. 7 Les modèles types de construction et leurs variantes, industrialisés ou non, susceptibles d’utilisation répétée doivent, avant toute commercialisation, être établies par un architecte (au sens de l’article 11) et ce, quel que soit le maître d’ouvrage qui les utilise.

Art. 8 Les risques économiques attribuables à l’architecte ne peuvent pas dépasser les risques découlant directement de la mission qui lui a été confiée.

Le maître d’ouvrage a lui-même obligation de contracter une assurance pour son opération.

Art. 9 Les administrations publiques ne peuvent pas confier simultanément ou successivement le même projet à des architectes différents sans motif valable, soumis à l’approbation du Conseil Supérieur (cf Art.3).
Les éventuels projets de modification ou d’agrandissement de l’ouvrage, postérieures à la construction, doivent être proposés en priorité à l’auteur du projet initial.

Art. 10 Les Conseils Supérieurs (cf Art.3) définissent les règles de protection des droits et des intérêts économiques du client.

TITRE 4 LA FONCTION D’ARCHITECTE

Art. 11 Au sens de cette directive, l’Architecte est la personne physique ou morale autorisée à exercer l’architecture par les directives de l’Union Européenne et la législation de chaque Etat membre. La directive se réfère à la définition du rôle et des compétences de l’architecte établie par le Comité Consultatif de la CEE.
L’oeuvre d’architecture est une oeuvre de l’esprit et de l’intelligence à caractère créatif.
Les Conseils Supérieurs (cf. art.3), dans le cadre des principes de sauvegarde des droits d’auteur, définissent des règles de protection des oeuvres d’architecture.
L’architecte (au sens du premier point de cet article) signe le projet et en est responsable; sa prestation est assurée contre d’éventuels dommages au client.
Tout projet doit être signé par tous les professionnels qualifiés qui ont contribué à son élaboration et qui en sont responsables.

Art 12 L’architecte exerce à titre personnel sous forme libérale ou en association avec d’autres ou en qualité de fonctionnaire ou salarié.
Il établit le projet, dirige les travaux, établit les pièces écrites, et joue un rôle de conseil, d’étude et de recherche.
Auprès du Comité de coordination européen des CSAUE toutes les personnes morales ou physiques habilitées à exercer l’architecture dans les différents Etats membres sont réunies dans un seul tableau quelles que soient les modalités selon lesquelles les tableaux sont établis et gérés par l’organe représentatif de la profession dans chaque pays.
A ce tableau européen doivent s’inscrire les personnes morales qui sont habilitées à établir des projets d’architecture (cf. Art 13).
Le code déontologique engageant tous les inscrits sera mis au point par le CSAUE, dans le délai le plus court possible.

Art. 13 Les Architectes peuvent constituer entre eux ou avec d’autres professionnels des sociétés d’architecture qui peuvent avoir la forme de :
– Sociétés civiles professionnelles ou interprofessionnelles, éventuellement coopératives.
– Sociétés anonymes ou à responsabilité limitée.

Quand une société d’architecture a la forme de société anonyme ou à responsabilité limitée, elle doit respecter les règles suivantes :
– les actions de la société doivent être nominatives
– la majorité du capital social doit être propriété des architectes
– l’adhésion d’un nouvel associé est subordonnée à l’acceptation de l’assemblée générale qui décide avec un majorité de deux tiers
– aucun des associés ne peut posséder plus de 50% du capital social
– le président du conseil d’administration, le directeur général, s’il est le seul, au moins la moitié des directeurs généraux, des membres du comité directeur ainsi que la majorité des membres du Conseil d’administration doivent être des architectes.

Art. 14 Afin de promouvoir et protéger la qualité de sa prestation et du produit, l’architecte a droit à une rémunération équitable, sachant qu’il s’agit d’une prestation intellectuelle (et pas d’un service).
Le Comité de coordination européen des CAUE fixera des valeurs indicatives.
Les valeurs minimum des rémunérations et des dédommagements dus à l’architecte, sont définis et établis par catégorie de travaux indépendamment de la nature du maître d’ouvrage.
Le taux des honoraires doit tenir compte du coût de l’assurance obligatoire. Les Etats membres doivent garantir une organisation de cette assurance telle que le montant des primes se limite à une proportion raisonnable des honoraires.
Les clauses des contrats qui prévoient que le paiement des honoraires est conditionné par des décisions ou événements indépendants des pouvoirs ou de la volonté du client et du professionnel ne sont pas valables.
Les délais accordés à l’architecte pour les différentes phases d’étude du projet doivent être raisonnables (en tout, pas moins de la moitié du temps d’exécution) et proportionnels à la complexité de l’oeuvre.
Les éventuelles modifications du programme en cours d’étude entraînent une modification du contrat et des honoraires complémentaires.

Art. 15 L’architecte peut être chargé de la tâche de certifier la régularité de son projet ou de quelques volets du projet quand l’organe de contrôle a défini le cadre réglementaire de référence.

TITRE 5 LA COMMANDE D’ARCHITECTURE

Art. 16 Les Etats membres favorisent ou rendent obligatoire, dans certaines situations, la procédure du concours entre architectes pour l’attribution des marchés publics.
Les différents types de concours et leurs modalités d’organisation sont soumises à l’approbation du Conseil Supérieur de l’Architecture, l’Urbanisme et l’Environnement (cf.Art 3).
Les concours sont ouverts de droit à tous les architectes inscrits à l’Ordre sans justificatif de chiffre d’affaires.
Les concours basés, même partiellement, sur la réduction des honoraires ou des remboursements professionnel sont interdits. Sont également interdits les concours basés, même partiellement, sur la réduction des délais du projet.

Art. 17 Les modalités d’organisation des concours dans les Etats membres sont fondées sur les principes suivants :
– mention de toutes les dispositions d’organisation dans l’avis de concours (remboursement des frais aux participants, modalités de formation des commissions, processus de jugement et composition du jury),
– transparence des modalités de sélection des participants et de choix du lauréat,
– justification des choix par des compte-rendus détaillés traitant de tous les projets,
– exposition publique des projets.
En cas d’abandon d’une opération après concours, les participants et le lauréat sont dédommagés.
Une procédure d’appel doit exister pour les participants au concours ou les citoyens concernés.
L’organisation d’un concours peut être confiée à des experts ou à des organisations culturelles.

Art. 18 Les commandes publiques d’architecture sont attribuées de la façon suivante : – pour les commandes dépassant un montant d’honoraires de 200 000 EUROS, l’appel à la confrontation des projets est obligatoire.
– pour les commandes correspondant à un montant d’honoraires compris entre 20 000 et 200 000 EUROS, chaque Etat membre établira des procédures simplifiées pour garantir la publicité et la libre concurrence entre les architectes, sans possibilité de dérogation sur les honoraires minimum,
– pour les commandes correspondant à un montant d’honoraires inférieur à 20 000 EUROS, chaque Etat membre établira les modalités selon lesquelles pourront être confiées des commandes directes, sans obligation de publicité ou sélection par concours.

TITRE 6 LE PROGRAMME ET LE PROJET

Art. 19 L’activité de projet vise à définir les caractères de l’intervention afin de garantir la meilleure mise en oeuvre de la volonté du maître d’ouvrage selon l’interprétation de l’architecte.
Le maître d’ouvrage, avec l’apport d’experts de différentes disciplines établit un document écrit qui définit les objectifs de l’opération et les besoins qu’elle doit satisfaire ainsi que les contraintes et exigences de qualité sociale, urbanistique, architecturale, fonctionnelle, technique et économique, d’insertion dans le paysage et de protection de l’environnement, relatives à la réalisation et à l’utilisation de l’ouvrage.

Art. 20 Les organes de conseil chargés d’examiner le projet doivent s’exprimer sur les qualités structurelles, fonctionnelles et figuratives de l’oeuvre et sur sa relation avec l’environnement qui l’entoure; cela sur la base d’un examen par les commissions techniques qui vérifient la correspondance du projet aux règlements.
Dans ce but les projets doivent être accompagnés par des images perspectives, photomontages ou autres qui en indiquent clairement l’insertion dans le contexte et leur rapport avec les éléments environnants dans les différentes échelles de lecture.
Les résultats de cette procédure doivent être facilement accessibles au public.

conclusion Le présent projet constitue le germe d’une réflexion qui doit se développer , grâce à la participation de tous les membres de l’OIA et dans d’autres lieux de débat.
Nous allons néanmoins le lancer vers les instances concernées, afin que le processus s’enclenche …